Non, ces photos ne prouvent pas que les femmes Afghanes avaient plus de libertés en 1970 que de nos jours.

Cette photo comparative de jeunes femmes Afghanes en mini-jupe dans les années 60/70 et de femmes en burqa de nos jours « voyage sur internet » depuis environ 2013, elle est reprise d’année en année et plus intensément ces derniers temps sur les réseaux sociaux. Ces visuels veulent nous faire comprendre que la condition féminine était plus libre dans les années 60/70 que de nos jours.
Plusieurs visuels avec des dates différentes circulent sur le web:

Le principal visuel partagé des milliers de fois étant composé de la photo ci-dessous :

Le visuel qui compare deux époques différentes avec la photo ci-dessus est TROMPEUR.

En effet, dans un article daté de Juin 2019, 20minutes.fr a retrouvé la photographe qui a pris cette photo et précise au média Français la réalité du contexte de cette photo.

La photo a été prise en 1972 à Kaboul par la photographe Suisse Laurence Brun pour l’agence Gamma qui explique que :

  • Dans le quartier de Shar-e-Naü (ville nouvelle), quelques jeunes filles émancipées portent la minijupe malgré les critiques virulentes de la majorité des Afghans encore fidèles aux traditions musulmanes. »

Selon la photographe,

  • des « mollahs, prêtres musulmans, n’hésitent pas à jeter de l’acide sur les jambes nues de ces jeunes effrontées.

« Les jeunes filles qui portaient ces tenues appartenaient plutôt à l’élite»

D’ailleurs, sur le site « gettyimages » la photographe suisse publie aussi une photo (ci-dessous) des mêmes années et nettement plus explicite, qui elle n’a pas été médiatisée sur les réseaux sociaux.

 

Ces jeunes filles jambes nues appartenaient à un groupe social bien identifié, confirme à 20minutes.fr Thomas J. Barfield, professeur d’anthropologie à l’université de Boston, qui a vécu à Kaboul dans les années 1970 :

  • «Les jeunes filles qui portaient ces tenues appartenaient plutôt à l’élite, à la population qui faisait des études – et il y avait peu de personnes diplômées du Supérieur à l’époque, que ce soient des hommes ou des femmes. »

Les étudiantes fréquentaient le quartier de l’université et il y avait peu de chances de les croiser dans le vieux Kaboul, plus traditionnel.

En dehors de la capitale, où se trouvaient à l’époque les seuls établissements d’enseignement supérieur du pays, le seul endroit où l’on croisait des Afghans habillés à l’occidental était dans les bâtiments de l’administration, se souvient Thomas J. Barfield.
Selon BBC.com, l’éducatrice Shahla Fareed raconte comment elle a ouvert sa propre école secrète pour filles dans les années 1970, lorsque les talibans avaient pris le contrôle de tout le pays.

  • Âgées de neuf à dix ans, nombre de ses élèves arrivaient vêtues de la traditionnelle burka bleue. Elle leur disait toujours de cacher leurs manuels d’Anglais dans les couvertures d’autres livres islamiques afin d’éviter d’être surprises par des regards désapprobateurs.

Enfin, Alex Shams, doctorant en anthropologie socioculturelle à l’université de Chicago (Etats-Unis) précisait au média français 20minutes.fr que :

  • « Le style vestimentaire adopté par ces jeunes femmes se limitait aux rues aisées de Kaboul et aux personnes qui avaient accès à l’éducation et à des perspectives. Leur nombre était alors extrêmement limité. La liberté de porter les vêtements de son choix fait partie intégrante de la liberté, mais ce n’est pas sa seule composante. On ne peut pas réduire le féminisme à un choix vestimentaire.

Au sein du régime monarchique afghan disparu en 1973,

  • « la grande majorité des femmes n’avaient pas accès aux études ou à un emploi à l’extérieur de chez elles » note le doctorant en anthropologie socioculturelle.

Le doctorant Alex Shams pointe là une 

  • « instrumentalisation politique » trompeuse, qui ne fait « qu’opposer l’islam à la civilisation occidentale ». « Cela fait croire que les droits des femmes ont été acquis grâce à l’Occident, ce que symboliserait le port de ces mini-jupes, analyse l’universitaire. Or cela gomme le fait que les femmes afghanes elles-mêmes ont combattu pour leurs propres droits et pour changer la société. »

La photo des femmes montrant leurs jambes ne peut donc pas être un cliché comparatif puisqu’il ne représente pas l’entièreté ou une majorité des femmes Afghanes.

Cette photo est aussi très partagée sur les réseaux sociaux, tout comme « la photo n°1 ». Elle veut nous démontrer que les femmes Afghanes étaient plus libres dans les années 70 que de nos jours.

La description de cette photo dit ceci :

  • #Afghanistan dans le passé 1970 #Afghanistan #Taliban’,

lit-on dans un tweet posté le 17 août 2021 qui a depuis été retweeté plus de 200 fois.

Tout comme la photo n°1, elle est loin de représenter la généralité d’une soi-disant liberté des femmes Afghanes dans les années 70.

Selon l’AFP.com, la même photo des jeunes femmes a été partagée dans le monde entier aux côtés de revendications similaires, notamment en Thaïlande, en Corée du Sud, en Espagne et en Hongrie.

Cependant, les messages sont trompeurs.

Une recherche d’image inversée sur Google a trouvé la même photo publiée dans cet article de politique étrangère du 6 février 2012 sur le site « foreignpolicy.com », intitulé « Il était une fois à Téhéran ».

La photo est sous-titrée :

  • ‘Salon des étudiants de l’Université de Téhéran en 1971. L’Université de Téhéran a été ouverte aux femmes en 1934 lorsque le collège a été fondé. Après la révolution, les femmes étaient toujours autorisées à fréquenter l’université, mais elles siègent désormais dans des zones séparées. ‘

On constate donc, que la photo n’a rien a voir avec l’Afghanistan, puisqu’elle a été prise en Iran, et comme pour la « photo n°1 », il s’agit d’une photo prise dans un complexe estudiantin et ne représente pas non plus la vie des femmes ou jeunes femmes Afghanes dans sa généralité.

Foreign Policy publie la photo avec «l’aimable autorisation de Kaveh Farrokh historien primé de l’Iran ancien« .

La même photo a également été publiée sur le site Web personnel de Farrokh, dans cet article intitulé « Old Téhéran 1960s and 1970s  »

La légende de la photo se lit comme suit :

  • Étudiants de l’université de Téhéran en 1971 (Source de l’image : R. Tarverdi (éditeur) & A. Massoudi (éditeur d’art), La terre des rois, Téhéran : Rahnama Publications, 1971)’.

La même photo est également apparue sur ce reportage de 2015 de CNN Turkish, sur la révolution islamique en Iran.

CONCLUSION :

L’actualité de ces derniers jours n’annonce rien de rassurant pour le peuple Afghan, et les femmes Afghanes en particulier, selon notre partenaire France24.com car le principal porte-parole des Talibans a assuré vouloir respecter les droits des femmes

  • dans le cadre de la charia, la loi islamique. Elles devront porter obligatoirement un voile mais pas la burqa.

Les clichés comparatifs circulant sur les réseaux sociaux sont donc loin de représenter une certaine liberté des femmes afghanes dans les années 60/70 dans sa généralité, mais plutôt une certaine élite, estudiantine entre autres.

20minutes.frcalames.abes.fr20minutes.fr –   gettyimages/laurence-brun –   gettyimages/photo 2afp.comFrance24.com


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