Fake News sur les séances d’éducation sexuelle à l’école

Loi shiappa témoignage cette maman a retiré sa fille de l’école et elle a bien raison l’heure est grave.

Durant l’été 2018, un nombre incroyable d’infox ou fake news a inondé Internet et des vidéos alarmistes ont été partagées par milliers.

On a pu lire ou entendre, pèle-mêle, qu’il y aurait des cours donnés aux enfants de 4 ans, des séances entre enfants et adultes pour « apprendre à se masturber », des ouvrages ouvertement pornographiques étudiés à l’école primaire, etc. Tout cela est FAUX et il est utile de reprendre les grandes lignes du programme, les vraies, et non celles qui sont fantasmées.

Dans cette vidéo, on peut voir une femme qui se filme dans sa voiture et prétend informer les gens sur les séances d’éducation sexuelle qui ont été mises en place dès la rentrée 2018. Nous l’avons choisie car elle illustre parfaitement toutes les rumeurs répandues sur les réseaux sociaux avec pour unique but : faire peur aux parents de jeunes enfants. La rumeur la plus tenace concernait l’enseignement de la masturbation à l’école dès 4 ans, alors que dans les programmes, en France, il n’est prévu aucun cours d’éducation sexuelle à la maternelle. Il n’y a pas non plus de cours de masturbation chez les plus grands (primaires, collèges ou lycée).

Toutes ces fausses informations ont surgi parce que Marlène Schiappa, secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, a demandé de faire appliquer plus strictement une loi de 2001 relative à l’éducation sexuelle à l’école et impose l’organisation de trois cours d’éducation sexuelle annuels en primaire, collège et lycée. Une circulaire a été publiée au Journal officiel, circulaire n° 2018-111 du 12-9-2018, pour faire appliquer la loi existante.

Dans le cadre de l’école élémentaire, qui concerne donc les classes du CP au CM2, la circulaire indique :

« À ce niveau d’âge, il ne s’agit pas d’une éducation explicite à la sexualité. Au regard des programmes d’enseignement, plusieurs thématiques peuvent constituer un objet d’étude, en prenant en compte l’âge des élèves :

  • l’étude et le respect du corps
  • le respect de soi et des autres
  • la notion d’intimité et de respect de la vie privée
  • le droit à la sécurité et à la protection
  • les différences morphologiques (homme, femme, garçon, fille)
  • la description et l’identification des changements du corps, particulièrement au moment de la puberté
  • la reproduction des êtres vivants
  • l’égalité entre les filles et les garçons
  • la prévention des violences sexistes et sexuelles. »

Les opposants à l’enseignement de l’éducation sexuelle à l’école s’appuyaient notamment sur un rapport du Centre fédéral allemand pour l’éducation à la santé (BZgA) pour l’OMS, datant de 2010 et intitulé « Standards pour l’éducation sexuelle en Europe« , qui n’est pas appliqué dans les écoles françaises. Les “anti” éducation sexuelle jouent sur la confusion entre recommandations de l’OMS et programme national d’éducation sexuelle pour répandre leurs intox.

La femme dans la vidéo parle de la « page 38 » de ces standards :

Des standards pour l’éducation sexuelle en Europe ont en effet été publiés en 2010, mais n’ont aucune valeur contraignante. Voir l’article de Libération à ce sujet.

Dans la catégorie «sexualité» de la tranche d’âge 0 à 4 ans, il est suggéré d’informer sur «le plaisir et la satisfaction liés au toucher de son propre corps, la masturbation enfantine précoce». Dans une FAQ publiée sur le rapport, l’OMS revient sur cette «préconisation». A la question «Est-il vrai que, comme le disent certains critiques, ces standards encouragent des enfants de 1 à 4 ans à la masturbation et à « jouer au docteur »?», l’OMS répond «Comme nous l’avons mentionné, il est crucial de considérer que l’éducation sexuelle doit être appropriée à l’âge. Ainsi, les Standards comprennent des informations sur les étapes de développement des enfants. Cette information est destinée aux professionnels (les professeurs et éducateurs), qui doivent être informés sur la variété des phénomènes naturels dans le développement psychosexuel des enfants, y compris, donc sur la masturbation infantile et les « jeux du docteur ».» Selon l’OMS, il ne faut donc pas comprendre que ces standards préconisent d’apprendre aux enfants à se masturber, mais indiquent que la masturbation infantile fait partie du développement de l’enfant et intervient avant quatre ans.

Dans cette vidéo fourre-tout, cette femme parle également de la déclaration des droits sexuels établie par l’IPPF (Fédération internationale de planification familiale) sous l’égide de l’ONU.

Extrait de la déclaration de l’IPPF : «Tous les enfants et adolescents ont le droit d’être protégés contre toutes les formes d’exploitation, soit : l’exploitation sexuelle, la prostitution des enfants et toutes les formes d’abus, de violence et de harcèlement sexuels, comme la coercition d’un enfant pour le contraindre à se livrer à une activité ou une pratique sexuelle et l’utilisation des enfants dans le cadre de spectacles ou de publications à caractère pornographique ».

Cette femme affirme également que toutes ces études ou documents sont basées sur les études faites par Alfred Kinsey, qu’elle traite de « pédophile notoire qui violait des bébés et des nourrissons et qui était financé par Rockfeller ».

Alfred Kinsey (1894-1956) est considéré comme un pionnier de la sexologie, mais également comme un précurseur de la révolution sexuelle des années 1960-1970.

Certains témoignages publiés par Kinsey l’ont amené à prêter à l’enfant prépubère une sexualité génitale orgasmique comparable à celle de l’adulte. Mais, l’institut Kinsey a admis que toutes les données statistiques sur ces « orgasmes infantiles » provenaient d’une seule source. Il s’agissait en fait de la retranscription du journal de Rex King, pédophile ayant exploité sexuellement des enfants.

En faisant des amalgames, notamment avec la loi Schiappa, cette vidéo déforme la réalité des textes officiels français. La circulaire mentionnée ci-dessus n’a rien à voir avec la loi Schiappa.

En effet, la loi Schiappa ne comporte aucune disposition sur l’éducation sexuelle des enfants. Seul l’article 10 évoque une « obligation de sensibilisation des personnels enseignants aux violences sexistes et sexuelles et à la formation au respect du non-consentement ».

Très relayées sur les réseaux sociaux, ces accusations viendraient du fait que la loi Schiappa ne fixe aucun âge au-dessous duquel une relation sexuelle est systématiquement considérée comme un viol. Certains auraient pourtant souhaité que toute relation sexuelle avec un mineur de moins de 15 ans soit automatiquement considérée comme un viol (défini dans le droit français comme un acte commis « par violence, contrainte, menace ou surprise »).

Il n’en demeure pas moins qu’il existe déjà, dans le code pénal, un délit d’atteinte sexuelle concernant les mineurs de moins de 15 ans : toute atteinte sexuelle sur un mineur de moins de 15 ans n’est donc pas systématiquement considérée comme un viol, mais est systématiquement considérée comme un délit, au minimum.

La loi Schiappa n’a absolument pas remis en cause ce délit d’atteinte sexuelle. Au contraire, elle a même durci les sanctions prévues pour les agresseurs. En aucun cas la pédophilie n’est donc légalisée.


Notre article d’août 2018 sur « la loi Schiappa » :

lejdd.fr  – education.gouv.fr   – www.sante-sexuelle.ch  – www.liberation.fr  – www.ippf.orgfr.wikipedia.org www.legifrance.gouv.fr  – Hoax-Net/Schiappa